Le peintre verrier, indissociable du maître verrier
Une fois effective la reprise des ateliers Barthe Bordereau, par Benoît de Pontbriand en 2017, il a semblé évident au nouveau dirigeant que l’entreprise devait offrir le panel complet des savoir-faire nécessaires à la création et à la restauration de vitraux. Pour favoriser cette harmonie au sein de l’atelier, l’entreprise a trouvé la compétence (et la sensibilité) qui lui conviennent… celle du peintre verrier.
Rencontre avec Tanguy de Sagazan, peintre verrier chez Barthe Bordereau.
Comment êtes-vous devenu peintre verrier ?
Ce n’était pas prévu, pour ainsi dire… Mon parcours n’a pas laissé présager cette transition de 2017, pour me former à l’art de la peinture sur verre, au moment où j’ai intégré l’équipe Barthe Bordereau.
Dans les années 2000, j’ai débuté comme graphiste et illustrateur diplômé en agence de communication, puis comme indépendant. J’ai ensuite ouvert une parenthèse et travaillé dans le bâtiment. Mais la peinture est restée mon violon d’Ingres. J’ai poursuivi mon travail artistique, glanant quelques prix à l’occasion d’expositions en Bretagne et en Suisse. L’appel de Barthe Bordereau m’a pris par surprise… Je me suis laissé séduire, je me suis formé et me voilà embarqué dans l’aventure.
Quelles sont les spécificités de la peinture sur verre ?
Elle se distingue des autres techniques à bien des égards. Il faut d’abord comprendre le rôle singulier de la lumière. Le peintre verrier travaille en négatif. Il laisse la lumière révéler les formes qu’il dessine, cette lumière qui, sur un bâtiment, n’a pas le même éclat ni la même orientation au fil des heures.
La base est donc un travail par occultation de la lumière. Le peintre verrier applique la grisaille (disponible en plusieurs tons) de manière à faire apparaître formes et nuances. Les modelés (terme désignant l’ensemble des techniques de travail sur la grisaille) permettent l’exécution des ombres, rehauts, drapés, dégradés… La cuisson fixe la grisaille au verre.
Pour restaurer ou créer un vitrail, travaillez-vous aussi la couleur ?
Bien sûr. Le peintre verrier travaille également en transparence, pour colorer les éléments de détails, avec les émaux sur verre. Appliqués en couche superficielle vitrifiable à la cuisson, ils sont complétés par d’autres procédés tels les cémentations, qui produisent par exemple les « Jaunes d’Argent ». Ces derniers procèdent d’une réaction chimique en cours de cuisson, entre les sels d’argents appliqués en surface et le sodium du verre. Cette oxydation se traduit par l’obtention d’une couleur jaune plus ou moins vive.
Qu’inspirent tous ces travaux à votre âme d’artiste ?
Ce que je découvre sur l’art et sur moi-même à travers la peinture sur verre est un émerveillement. Moi qui ai toujours été attiré par le défi de la création artistique, je m’inscris, comme peintre verrier dans une autre démarche : pour restaurer, je me mets « au service de l’artiste » qui a créé le vitrail plusieurs siècles auparavant. Je comprends à tâtons sa démarche et ses méthodes. C’est un travail humble au service du patrimoine commun. Il enrichit aussi ma technique et fait mûrir mon style propre, pour les mettre ensuite au service de projets de création, à travers la commande privée ou publique. Là aussi l’humilité est de mise. Car le peintre verrier est membre d’une équipe. Son travail ne prend forme qu’avec le concours de ceux qui découpent et qui assemblent.